SÉRIE
Que ce soit dans mon travail en gravure comme en peinture, je suis «soumise» à la loi des séries, difficile de lutter…
Bien évidemment elle n’est pas prise ici dans le sens négatif que l’adage populaire veut lui conférer habituellement.
Mon travail s’est organisé au fil des années autour de la série comme principe de travail.
Faut-il croire que cela me rassure ? Cela reste mystérieux pour moi.
L’utilisation de cette méthode de travail a du sens pour le développement de mon oeuvre.
On peut aisément parler de tactique d’approche du sujet.
La série implique de fouiller, creuser, mettre à plat le sujet, de le pousser dans ses retranchements.
L’user au maximum pour en tirer un matériau sensible; le modeler pour devenir un sujet qui évoluera et prendra petit à petit son sens, sa forme véritable.
La série peut présupposer l’ennui…
Au contraire, elle donne un cadre qui permettra l’entrée en matière et une certaine rigueur.
Ce qui est en effet intéressant dans ce type de parti pris, c’est d’accepter que la liberté arrive quand on assume pleinement ces contraintes.
L‘exercice du travail sériel est en lui-même de transcender et dépasser le sujet, oublier et s’abstraire aussi vite du format.
Rien ne vient plus troubler l’appréhension du sujet pour rester purement et simplement dans l’acte de peindre et graver.
La série apporte une scansion nécessaire à mon travail.
Chaque peinture ou gravure fait écho aux autres et devient un maillon indispensable dans la construction d’une série.
Cette gravure ou peinture devient alors partie prenante de l’ensemble, lui donne sa cohérence.
Le rythme dans mon travail est «imposé» par la série que j’imagine (j’ai parlé de loi des séries) par le choix du format, du nombre, de la technique utilisée et du papier.
La série prend alors tout son sens.
Difficile de travailler «hors cadre»…
La sérialité est d’abord au service du processus créatif et apporte une sérénité rassurante.
Elle n’est en rien oppressante.
Anne-Christine Tcheuffa-Marcou
janvier 2018
Textes sur quelques peintures d’Anne-Christine Tcheuffa-Marcou
Paysage III :
Ils avancent lentement
Dans le petit matin brumeux
caressant la lumière du jour,
dans la certitude d’un chemin.
J’entends les bruits sourds de leurs pas,
les froissements d’étoffe
et les chuchotements
s’éparpillant dans l’air.
Parcours :
Les brindilles s’enroulent
dans le brouillard solide,
tristesse entortillée
de ces lichens en pleurs
qui coulent et chantent,
mais s’accrochent,
ensemble,
à la terre.
Parc :
La terre est par dessus les toits,
si sombre, si nerveuse,
l’humus et les racines me voient
et leur parfum m’attaque,
sous le ciel enterré.
A propos des gravures :
Les brindilles de l’à-peine
fragiles et chaotiques.
Le trai le lien le rien
le Graph sous la griffe
des fils intimes qui dansent bougent luttent
un départ installé
le crépitement du lieu
Textes de Perrine Simon (mars 2018)